Ribur attendait aux "portes" du village, du moins ce qu'il en restait, Eldor Argoes avec qui il comptait vérifier les lieux. À eux deux ils devraient pouvoir facilement délimiter la zone de risque qui les entoure, l'Homme ayant été un Capitaine de la Légion d'Acier et le Nain étant un Seigneur de Guerre, ils devraient rapidement "cerner" le secteur. Mais le vieux barbu comptait bien profiter de ce moment pour en apprendre plus sur cet humain qui semblait si "valeureux" et "droit dans ses bottes", ce qui semblait bien trop beau pour un humain, au sens du nain aucun homme ne pouvait avoir toutes ses qualités réunies.

Ribur avait prit soin de prendre quelques morceaux de viande séchées ainsi qu'une gourde d'eau fraîchement puisée à la rivière. Piétinant dans ses pensées, il fumait un peu d'herbe à pipe sachant qu'il ne lui en restait pas beaucoup il faisait attention, mais attendre n'étais pas son point fort, surtout en étant taraudé de la sorte entre ses convictions personnels et ce qui se présente à lui. Lorsque le nain tourna la tête il vit à quelque pas de lui Eldor Argoes qui avançait d'un pas franc et décidé en sa direction.

Eldor avançait vers les portes du village, si on pouvait appeler ces ruines comme ça. Il avait convenu avec Ribur de partir en reconnaissance pour explorer les alentours encore inconnus du village. Plus précisément vers l'Est de leur position actuelle. Il avait fait le plein de provision et d'eau au cas où, ainsi que de quoi faire du feu. On ne sait jamais ce qui peut arriver dans un territoire inconnu. Équipé de son armure déglinguée et de son épée émoussée, Eldor regrettait de ne pas avoir un bouclier, même un simple bouclier en bois aurait fait l'affaire. Il avait appris à se battre de cette façon, même si il ne s'en sortait pas trop mal sans, il se sentait plus à l'aise avec.

Eldor soupira alors que les ruines étaient maintenant visibles. Le Seigneur de guerre nain était déjà là, fumant la pipe, attendant patiemment son arrivé. Il espérait qu'il n'avais pas trop fait attendre Ribur, il ne souhaitais pas se faire réprimander par lui. Il n'avait pas beaucoup côtoyé de nains dans sa vie mais il savait que la plupart d'entre eux étaient de bon vivants, bagarreurs et guerriers, aimant vider leurs chope de bière naines dés que l'occasion se présentait. Il savait aussi qu'ils étaient susceptible, orgueilleux et fiers en général. Eldor aller devoir faire attention à ce qu'il allait dire, il ne voulait pas se brouiller avec son nouveau compagnon. Il leva un bras, secouant la main gentiment pour capter son attention.

"Désolé si je vous ai fait attendre seigneur Ribur. Cependant je suis prêt à partir faire notre reconnaissance autour du village. Je pense qu'il serait judicieux de partir vers l'Est puisque nous n'avons encore jamais mit les pieds dans cette zone. Nous devons nous assurer que nous encourons aucun danger immédiat. Qu'en pensez-vous ? "

Le nain savait que l'homme avait raison, l'Est semblait être l'option la plus judicieuse : "Tu as sûrement raison, géographiquement parlant le village est bordé à l'Ouest et le Nord par la rivière, il ne nous reste que l'Est et le Sud. Commençons donc par l'Est le terrain à l'air plus praticable." Ribur avait beaucoup d'autres chose à dire mais il se contenta de ces quelques mots pour l'instant, réfléchissant à la suite des événements. "J'espère que tu n'as pas peur de dormir à la belle étoile, qui sait jusqu'où nos pas nous porterons ? Et si cette forêt était sans fin ? Quoi qu'il en soit, nous sommes deux enfants de la guerre nous ne devrions pas avoir trop de soucis avec quelques branches mortes !" Lança fièrement le nain tout en réalisant sa bêtise "Je ferais mieux de tenir ma langue" pensa-t'il directement. Le nain sauta bas de son caillou qui lui servait de siège d'attente, la pipe toujours au bec il prit la marche en direction de l'Est vers cette forêt qui semblait si immense, en tout cas à vue de nain. Laissant derrière lui fumée de pipe et poussière au gré des pas, il était donc en route avec son nouveau compagnon humain.
Au bout de quelques pas, alors qu'ils n'étaient même pas encore à l'orée du bois, le nain ne su se retenir plus longtemps, il fallait qu'il en sache plus, cet homme l'intriguait beaucoup trop :
"Donc si j'ai bien entendu, tu étais un soldat de la Légion d'Acier, mais tu semblais parler d'eux comme d'un ancien groupe et non pas comme d'un passé tellement proche qu'on y serait encore... Pourquoi les as-tu quitté ? Serais-tu un déserteur ?" Visant le sens de l'honneur de l'Homme, il cherchait à voir sa profondeur.

Eldor sourit, ce Ribur avait de l'énergie à revendre. Il semblait tout le temps en train de réfléchir, ce qui n'est pas commun pour un nain.

" Je n'ai pas peur de dormir dehors même si je préfère le confort d'un lit douillet. Je ne pense pas non plus que cette foret soit infini, toute chose à une fin, quelle soit grande ou petite. Je suis d'accord avec vous, mais sachez je ne tiens pas particulièrement à me battre, sauf en cas de nécessité. "

Eldor regarda alors Ribur descendre de son perchoir et commencé à marcher vers cette drôle de foret, à l'Est du village. Il rattrapa le nain en quelques enjambés, faisant bien attention à calquer son rythme de marche sur celui de Ribur. Juste avant l'orée de la foret, Ribur lui posa une question qui le mis mal à l'aise ... Avait-il déserté le légion d'Acier ? Pour être franc, il ne le savait pas lui-même. Est-ce que la légion d'Acier existait t-elle encore ? Le seigneur de guerre nain avait remis à nu des questions qu'il croyait avoir oubliées. Des souvenirs qu'il le faisait encore souffrir, surement pour le reste de son existence. Il devait une réponse à Ribur et Eldor choisit de dire la vérité. Ils devaient se faire confiance mutuellement. L’honnêteté était une des valeurs qu'il avait à cœur depuis l'enfance.

" Pour être honnête avec vous seigneur Ribur, je ne le sais pas moi même. La ville ou j’étais en garnison à été attaquée et détruite et après avoir sauvé autant de vies que possible, j'ai abandonné mon poste. Pas par lâcheté ou couardise, mais pour essayer de sauver des personnes chères à mon cœur. Je dois bien avouer que je sais même pas si la légion d'Acier existe encore ou si elle me considère comme un déserteur. Dans tout les cas, cette époque est derrière moi et je ne souhaite pas y retourner. Ai-je répondu à votre question ? "

Le nain garda le silence un moment, les mots de l'homme venaient de faire mouche en lui. Ribur cherchait comment poser sa pensée en mots pour son comparse, ils étaient désormais entrée dans cette grande forêt sombre et fraîche. Cette même fraîcheur aida fortement le nain à faire le tri dans ses idées et c'est là qu'il trouva sa réponse :
"Oui tu as répondu à ma question, en vérité tu es un déserteur mais pas un lâche. Un déserteur de principe. J'ai moi-même abandonné les miens durant plusieurs cycles pour m'occuper de Bëowür, qui a furieusement "grandi" entre nous soit dit ! Outre le fait que tu ai fuit ton poste et tes obligations militaires, tu as risqué ta vie pour celle des autres et cela n'a pas de prix." À peine eut-il fini sa phrase qu'une nouvelle interrogation lui prit la tête mais la franchise d'Eldor plaisait beaucoup à Ribur donc il lui parlerait avec autant de franchise :
"Je me demandais... Tu crois qu'il reste quelque chose de Nevilim ? Qu'il y a d'autres gens comme nous ? Ou alors il ne reste rien et on est les seuls couillons qui vont essayer de survivre ? Quoi qu'il en soit, si on doit survivre, j'aimerais vraiment qu'un brasseur nain nous rejoigne, je n'ai franchement pas envie de boire de la bière Elfe ou Humaine ! As-tu déjà goûter la bière naine ? Incomparable avec votre pisse d'âne..." Et comme à son habitude, lorsque Ribur parle mal du reste du monde...
"Mille crottes de bouc ! Qui est l'ébarbé qui à laissé une telle pierre sur la route ?! Bon y à pas de route mais j'ai demandé l'avis de personne !" Fusillant presque du regard l'humain qui avait presque l'air amusé de la scène. "Et tant que j'y pense, vu que rien n'est infini, nous non plus ! Faudrait pas qu'on s'éternise trop longtemps ou que je m'empatouille les pattes dans tout ce qui traîne ! Et vu qu'on à pas le même point de vue, je parle bien de hauteur oui, si tu vois quelque chose au loin d’intéressant fait moi signe !" Le nain avait l'air de maudire intérieurement ce caillou et sa botte mais n'avait aucune animosité pour le reste du monde, il allait tenté de "chatouiller" Eldor avec des petites lances sur les humains pour voir où se situait les limites de sa patience. "On a deux Long-sur-Patte au village, l'Oreille-Pointue et le bou... l'Homme, toi ! Autant profiter de votre hauteur !"

Eldor sentit son cœur s'alléger, Ribur lui avait répondu comme il espérait. Il ne l'avait pas jugé, il avait juste accepté et compris son point de vue et ses sentiments sans arrières pensées. Il pensait avoir trouvé des compagnons dignes, mais peut-être était-il trop tôt pour s'en assurer ? Le temps le lui dirait en temps voulut. Dans tout les cas, Eldor appréciait la compagnie de Ribur. Il le voyait comme une personne sympathique, cultivée, franche, et directe. Ribur dit quelque chose à propos de Bëowür, ce n'était pas la première fois que Ribur disait ce mot. Eldor pensait que ce mot était pour 157. Il préféra poser la question pour ne pas commettre de quiproquos.

" Ce Bëowür dont vous parlez, c'est 157 n'est-ce-pas ? Que signifie ce mot ? Il fait partie du répertoire de la langue naine ? Il est vrai que je me pose la question, somme nous toujours dans notre monde, ou dans une région éloignée et inconnue ? J'espère comme vous que nous ne soyons pas les seuls personnes ici, peut importe où nous somme. Avons nous étaient envoyés sur ces terres pour être récompensés, pour être punis ou est-ce simplement le fruit du hasard ? Je pense que ... "

Eldor fut interrompus dans ses réflexions par le soudain juron du nain, qui s'était entravé dans une pierre qui dépassait. Il se retient de rire devant l'absurde de la situation. Son compagnon lui envoya un regard mauvais, lui faisant bien comprendre de ne pas faire la moindre remarque. Plutôt que de chercher querelle, Eldor décida de continuer à répondre au seigneur nain :

" Je dois bien avouer que certaines bières sont meilleurs que d'autres et j'avoue n'avoir jamais eu l'occasion de gouter une boisson de votre peuple, aussi réputées soient-elles. "

Même si il ne compris pas la fin de la phrase de Ribur, Eldor releva la pique de celui-ci. Plutôt que de rentrer dans son jeu, il décida de contrattaquer, pensant que le nain perdrait patience avant lui.

" Et ne vous en faite pas, je vous préviendrez si quelque chose sort de l’ordinaire et attire mon attention. Tenez vous juste prêt à détaler en cas de besoin. Si vous n'arrivez pas à me suivre, je vous porterais pour aller plus vite ... "

"HAHA Un dos humain comme guise de monture, au moins tes grandes jambes me seront utiles ainsi ! Et je suis au regret de te dire que tu as tout raté dans ton existence, malheureusement pour toi, tout ce que tu as connu jusque là n'a aucune saveur, aucun goût... N'avoir jamais bu de bière naine... Tu mériterais qu'on te rase tu sais ?" Le nain secouait les pieds, une espèce de boue poudreuse s'était accroché sur la pointe de ses bottes.
"Et les nains ne croient pas au hasard, c'est bien trop hasardeux... Donc nous ne sommes pas ici par le fruit du "hasard" mais plutôt par autre chose. Ta réflexion sur les contrées éloignées est loin d'être bête, seulement, j'ai parcouru Nevilim de long en large et je n'ai jamais rien vu de tel auparavant." À peine eut-il fini sa phrase qu'il replongea directement dans ses pensées, l'une des question d'Eldor l'avait perturbé "qui est Bëowür ?". Cherchant une réponse cohérente et juste, envers lui comme envers Bëowür, comment expliquer cette histoire ?

Ils avaient déjà parcouru une belle petite distance dans cette forêt, à tel point que si l'on se retournait pour voir d'où ils étaient entré il en était impossible, l'orée du bois était hors de vue depuis un moment. Le soleil perçait ça et là entre les feuillages sombres et épais des arbres de cette forêt qui au fur et à mesure des pas de nos comparses devenait de plus en plus lugubre, les bruits environnent ainsi que ceux des animaux de la forêt semblait de plus en plus glauque aussi. Mais rien de tout ça n'avait perturbé le nain dans ses réflexions, d'ailleurs il ne prêtait même plus attention au comportement physique de son comparse humain, tant il cherchait une réponse convenable et finalement il décida de répondre de la façon la plus simple possible :
"Bëowür est bel et bien "157" et je me refuse de le nommer numériquement, c'est un être à part entière avec des sentiments, des réflexions et une intelligence hors du commun. Je ne sais pas ce qu'on lui à fait ni pourquoi, mais il ne le mérite pas ! Cette histoire remonte à il y a déjà bien longtemps... Je vais te passer les détails qui ne servent pas à grand chose... J'ai été séparé de ma section alors que j'étais envoyé en mission, alors que je cherchais à retrouver mon groupe j'ai trouvé autre chose, quelque chose que je n'avais encore jamais vu avant : 157 ! Mais il était dans un piteux état, je l'ai soigné et nous avons appris à nous apprivoiser l'un l'autre. Alors que nous avons vécu presque trois cycles nain ensemble, il a trouvé sa louve et c'est là que j'ai décidé de l'appelé Bëowür, le fils du loup, en ancienne langue naine. Donc même si tu savais parlé ma langue, tu n'aurais pu traduire. Ce garçon est comme un fils pour moi, il a en lui bien plus que d'autre n'aurons jamais, son cœur est bien plus pur et noble que celui de n'importe quel nain ou n'importe quel homme. Son insouciance face à la vie et à notre "commun" fait de lui un être à part, sa vision nous aide à voir autrement. De mon vivant, personne ne lui fera du mal. À l'époque, mes obligations naines m'ont forcé à le quitter... Aujourd'hui je n'ai plus aucunes obligations à part envers vous tous, et surtout envers lui. Il me doit la vie une fois et je lui dois deux fois au moins... Je lui ai enseigné à ne plus se laisser faire, il m'a enseigné à voir la réalité en face... Il faudrait à nouveau que le monde s'effondre pour que je l'abandonne encore !" Ses derniers mots auraient fait tremblé plus d'un colosse tellement ils étaient ampli de ferveur et de dévotion. 157 était bien plus qu'un compagnon d'infortune pour Ribur et il l'arborait fièrement, la différence de Bëowür serait son cheval de bataille si quelqu'un ose encore s'en servir comme fer de torture. À cet instant précis le nain fixait profondément l'homme dans les yeux, cherchant en son regard une réponse insonore au cas où il ne parlerait pas.

Eldor sourit quand Ribur avait dis qu'il méritait qu'on le rase. Cela serait certainement un déplaisir pour lui, mais il considéra que ce devait être un grand déshonneur pour un nain. Car de ce qu'il savait sur ce peuple, leur barbe est aussi importante que leur vie. Il était aussi d'accord avec le seigneur de guerre, il n'avait jamais rien vu de tel, même si il n'ait pas autant voyagé que Ribur. Ce ne l'avait pas frappé au premier abord, mais les végétaux, l'eau, l'air, tout était légèrement différent de ce qu'il connaissait. Il avait même vu des plantes inconnues, qu'il n'avait jamais rencontrées auparavant. Il devait bien avouer qu'il était un peu impatient de rencontrer la faune de ce "nouveau monde".
Cela faisait un moment que les deux comparses marchaient dans la forêt, plus ils avançaient et plus elle devenait lugubre. Les arbres blanchissaient à vu d’œil, leurs branches se faisant plus crochues, comme des doigts cherchant à vous saisir pour vous tordre le cou. La lumière se faisait de moins en moins vive et la pénombre gagnait doucement du terrain au fur et à mesure de leur progression. Même les bruits alentours des animaux s'étaient tus, plongeant la forêt dans un silence oppressant. La peur et l’appréhension commençait à envahir l'esprit d'Eldor tandis qu'il réprimait un frisson le long de son dos. Son instinct lui disait de ficher le camp, ils étaient en danger ici. Il ne savait pas comment mais il le sentait au fond de lui-même.
Alors qu'il allait suggérer à son compagnon de faire demi-tour, Ribur pris de nouveau la parole, brisant le silence qui commençait à pesait sur l’estomac de l'humain. Le chef de guerre lui parla de 157, la façon dont il parlait de lui faisait chaud au cœur. Il le considérait comme son propre fils. Que le nain dévoile son coté paternel et sensible à Eldor renforça encore son respect pour lui.

" J'avoue ne pas avoir compris pourquoi il se défini avec un chiffre, en tout cas, il a de la chance de vous avoir pour veillez sur lui. Il est amusant et original ... Dans le bon sens du terme, bien entendu. Il est curieux et franc, même si on à du mal à comprendre ce qui lui passe par la tête la plupart du temps. Dans tout les cas, il reste un enfant et je ferais tout ce que je peux pour le protéger, et tous ceux du village aussi. "

Eldor s’arrêta de marcher d'un seul coup, le malaise était revenu, encore plus fort qu'avant. La tension dans l'air était palpable. Il y avait de forte chance que quelqu'un ou quelque chose les observe en ce moment mème, tapis dans les ombres, quelque chose de dangereux. Tous ses sens étaient en alertes, ses yeux furetant à droite et à gauche, prêts à réagir au moindre mouvement suspect. Il posa lentement sa main gauche sur la fusée de son épée, prêt à dégainer. Il espérait que c'était son esprit qui lui jouait des tours. Il finit par avertir Ribur du potentiel danger :

"Il y a quelque chose dans le coin Ribur. J'espère que je me trompe mais restez sur vos garde ... "

"Ha ça ? Tu te sens observé c'est ça ? Regarde là au dessus, c'est Maïa qui nous observe au loin, je pense que Bëowür veille au grain..." Ribur se retourna pour pointer la louve du bout du doigt et au moment au l'index désigna la cible un grondement sourd et étouffé se fit entendre des fourrés avoisinants. "Là c'est pas la louve" pensa le nain, sa main droite redescendit sur la hampe de sa hache mais n'eut pas le temps de finir son geste que le son de grondement prit la forme d'une bête en charge. Sans même avoir le temps de voir l'espèce de l'attaquant le nain fut projeté de sa position roulant sur le dos de la créature il réussi à peine à attraper une touffe de poil pour s'y cramponner dur comme mitrhil. Filant désormais sur le dos de la bête, le nain ressemblait plus à un drapeau de légion virevoltant au gré de son cavalier, essayant tant bien que mal de remonter en position de maître sur la créature et surtout enfin définir ce que s'était. Mais les tentatives du nain étaient systématiquement réduites à néant par la puissance et la vitesse de la bête qui lui envoyait des coups de sabot en plein poitrail tout en continuant de courir à toute allure. Ribur ne savait même pas si il était loin ou proche de son compagnon Eldor, tout ce qu'il savait c'est qu'il était dans un situation bien contraignante : lâcher prise signifierait un écrasement plus que violent au sol et laisserait un énorme avantage à cette bête en furie, mais rester tirer dans cette position est éreintant et épuisant pour le nain, il faudrait au moins qu'il arrive à se mettre correctement sur son dos. Dans cette course effréné avec la bête Ribur avait totalement perdu le sens de l'orientation, il cherchait une échappatoire et au moment où il se croyait sans issue il entendit une voix bien familière lui crier "Attention Seigneur Ribur !" c'était Eldor, sûrement son sauveur.

Eldor eu à peine le temps de se retourner vers le bruit qu’une ombre chargea sur Ribur et l’emporta avec lui. Le nain se maintenait tant bien que mal sur l’agresseur, s’accrochant aux poils de la bête. Celle-ci continua sa course et disparut dans un buisson. Ni une, ni deux, Eldor s’élança à leur poursuite aussi vite qu’il le pouvait. Ce n’était pas si dur de suivre l’improbable duo, il suffisait de se laissait guider par les cris du nain. Il arriva dans une petite clairière où il put enfin observer la créature qui les avaient attaqués et qui essayait désespérément de se débarrasser de Ribur en ruant dans tous les sens.

Eldor pris quelques secondes pour observer l’animal. Il s’agissait d’une sorte de bouquetin géant, avec un pelage épais de marron et de gris, ainsi que de profonds yeux jaunes. D’après son estimation, la créature faisait environ sa taille mais le plus impressionnant c’était ses cornes complétement noires : enroulées autour de sa tête comme un casque. Un seul coup de ses massues naturelles aurait pu les briser les os. Il fallait aider Ribur, le pauvre était toujours accroché au poitrail du bouc, mais s’il lâcher prise comme ça, il serait surement piétiné par l’imposante créature. Il n’avait pas d’autre choix que de s’accrocher à elle de toutes ses forces.

Eldor voulait aider le seigneur de guerre, mais il ne voyait pas comment s’y prendre. Attaquer la bête de front n’était pas la meilleure idée, surtout que le risque de blesser le nain dans la manœuvre était grand, sans compter son état à lui s’il ratait son coup et se faisait aplatir par les cornes du bouc. Non, il devait rapidement trouver une solution pour faire chuter ou immobiliser l’animal, permettant ainsi à Ribur de lâcher prise presque sans risques et en évitant de blesser le bouc. Une pierre deux coups en somme. Le problème était qu’il manquait cruellement de temps pour fabriquer un piège digne de ce nom. Il pourrait peut-être se jeter à corps perdu contre le bouc pour le faire chuter ? Le défi était la taille et le poids de l’animal, sans parler de sa vivacité. Il pourrait facilement éviter sa charge, et même si il arrivait à placer son tacle, est-ce que son propre poids serait suffisant pour faire choir le bouquetin ? Dans tous les cas, il devait agir vite, avant que Ribur ne fatigue et se fasse piétiner par la grosse bestiole cornue.

Eldor eu soudain une idée, enfin plus un souvenir. Quand il était petit et qu’il partait avec les chasseurs de son village, certains utiliser une corde avec des poids aux extrémités. Si elle était lancée correctement, les grosses proies se prenaient les pattes dedans et chutait. Apparemment, c’était une arme qui venait du Nord de Nevilim et que son village avait adapté pour la chasse. Il ne se souvenait plus comment cela s’appelait : un bolos , un balos, un bolas ? Cela importait peu dans la situation, ça lui reviendrait plus tard.  Un sourire se forma sur le visage d’Eldor. L’arme ne le mettais pas directement en danger et mettrais au sol l’animal sans le blesser ni lui, ni Ribur. C’était parfait.

Eldor arracha une grosse liane qui pendait entre deux arbres proches. Il fit rapidement un nœud en faisant passée les extrémités de liane par celui-ci. La liane avait maintenant quatre extrémités. Il ramassât quatre cailloux à peu près de la même grosseur et les noua grossièrement de aux extrémités de la liane. C’était près. Il avança doucement, faisant tourner l’arme improvisée au-dessus de sa tête. Il se mit à hurler et à faire du bruit pour attirer l’attention du bouquetin, Ribur se balançant toujours au grès des mouvements de l’animal. Dès que le bouc le remarqua, il chargea droit sur lui, cornes en avant, permettant à Eldor de bien viser les pattes antérieures de l’animal. Il choisit d’avertir Ribur de la prochaine chute du bouquetin, s’il ne ratait pas son coup :

«  Attention seigneur Ribur ! »

Eldor lâcha alors le drôle de projectile qui alla s’empêtrait dans les pattes avant du bouc. Ne pouvant plus se servir de ses pattes, l’animal se vautrât lamentablement sur le côté, incapable de se relever. Il était certainement devenu inoffensif. Une question traversa alors l’esprit d’Eldor. Que faisait ce bouquetin ici ? De ce qu’il savait, ce genre d’animal vivait dans les montagnes en altitude. Il pensa alors aux montagnes qu’on voyait au Nord du village. Il venait certainement de là-bas. Les avait-il attaqués pour protéger son territoire ou fuyait-il quelque chose de plus dangereux ? Eldor décida de garder ses interrogations pour plus tard. Il devait d’abord s’assurer que son compagnon allait bien. Ne le voyant pas derrière le bouc qui se débattait, il décida d’appeler le nain :

« Seigneur Ribur ? Vous allez bien ? Vous n’êtes pas blessé ? »

"Milles crottes de bouc ! Satanée bestioles ! Si tu cherche la bagarre tu vas l'avoir !" Ribur sortait péniblement du buisson dans lequel il avait lamentablement atterri pour finir sa course. Les cheveux et la barbe pleine de branches et de feuilles le nain se montra à l'appel de son sauveur humain.
"Merci bien Eldor de m'avoir sauvé de ce..." Le nain se retourna pour voir enfin la créature "et bien bouquetin à vue d’œil ! Sans toi je ne sais pas ce qu'il aurait advenu de moi ! N'empêche quand j'y pense, ça aurait été un comble terrible ! Moi, Ribur fils de Gléobur le chevaucheur de bouc, j'aurais fini mort tué par un bouc ! Écrasé et peut-être même mâchouillé ! Je t'en dois une belle mais pour l'instant je suis exténué, je n'ai jamais été très doué pour la cavalcade et encore moins lorsqu'elle est forcée !" Le nain fit un tour d'horizon puis se retourna d'un geste sec vers l'humain, l'air un peu inquiet
"Mais... Où sommes nous ? Rassure moi, tu as suivi le chemin jusqu'ici ? Tu sais où nous sommes ? Tu sais où se trouve le village ? Je n'ai franchement pas envie d'être perdu ici... Mais au moins nous sommes dans une clairière et je t'avoue sincèrement que je poserais volontiers mon derrière une petite heure, je suis à bout de force... Le pire c'est que le bouc ne se mange même pas..."
Ribur alla s'installer au pied d'un arbre d'où il pouvait faire face à la créature qui l'avait chargé un peu plus tôt, une fois adosser à son nouvel ami sylvestre il prit dans la poche intérieur de sa cotte de maille (qu'il avait confectionné lui-même dans les mailles de son armure) un petit étui, duquel il sorti sa pipe sculptée et gravée, qu'il empli d'herbe à pipe. Après quelques bouffées bien méritées il tourna la tête vers Eldor qui était affairé autour de l'animal :
"Dis moi Eldor, est-ce que tu fumes la pipe ? Si ce n'est pas le cas, mon oncle Braldur te dirais que c'est le moment idéal pour commencer Haha !" Tout en riant Ribur se redressa et fit quelques pas en direction de l'humain qui était à genoux à quelques pas du bouc immense.
"Quand je vois le rapport poids-taille de la créature, ça me rappel la première fois que j'ai vu le bouc de mon père lorsque je n'étais qu'un bébé nain ! Ah je ne portais que la moustache à l'époque et j'étais bien joufflu... Bref c'est une autre histoire ! Je peux te demander ce que tu fais là en silence ? Tu veux une bouffée peut-être ? T'as l'air tout pâle... Quelque chose ne va pas ?" Ribur ne savait pas trop si son ami était inquiet ou triste ou autre encore, mais il voyait bien que quelque chose différait du personnage avec qui il avait commencé son aventure. Le nain nourrissait un certain respect pour cet homme qui en prime d'avoir des valeurs et être différents des autres "saloperie de longs-sur-pattes", venait de lui sauver la vie, ou tout du moins de beau nombre de blessures plus violentes les unes que les autres. Ce même respect le poussait à s'enquérir de l'état de son comparse, si celui-ci faiblissait ils prenaient tout deux un risque, il devrait donc faire tout ce qui est en son pouvoir pour remettre son nouvel ami droit dans ses bottes. En attendant la réponse d'Eldor le nain se préparait mentalement à toute sorte de débat verbal.

Eldor entendit Ribur jurer dans les buissons avoisinants, il avait dû être éjecté lors de la chute du bouquetin. Il regarda dans la direction de la voix puissante du nain, il avait l'air d'aller bien. De toute façon tant qu'il faisait autant de bruit c'est qu'il n'était pas blessé. Eldor recentra donc son attention sur l'animal en face de lui. Le bouc géant continuait de se débattre de façon régulière, sentant qu’il se trouvait en position de faiblesse et en potentiel danger de mort. Il soupira légèrement, il avait réussi son coup. Que faire de l’animal maintenant ? Le plus simple aurait été de le tuer tout simplement, mais Eldor s’y refusait, il n’était pas venu pour chasser. De plus il ne voyait pas comment ramener une proie de cette taille au village, en assumant que sa viande soit comestible. Non, le mieux à faire était de le libérer en espérant qu’il partirait sans demander son reste. Eldor parcourut alors les quelques mètres qui le séparait de l’animal et posa son genou droit à terre. Il enleva ensuite ses gantelets pour avoir les mains libres et sorti son coutelas de son étui de cuir. Il plongea ses yeux dans ceux dorées du bouquetin. Il voyait la peur dans ceux-ci, la peur de la grande faucheuse, du vide éternel. Eldor tendit doucement sa main droite vers le cou de l’animal, plongeant ses doigts dans la chaude fourrure du bouc. Il sentait ses veines sous sa peau qui pulsaient sous les battements affolés de son cœur.

« Paix mon ami, paix, je ne vais pas te faire de mal … »

Il savait qu’il y avait de grande chance que l’animal ne comprenne pas ce qu’il disait. Il resta donc dans cette position, regardant le bouc avec calme, sa main sur cou, espérant que ses contacts suffisent pour calmer la bête. Il sentit le rythme cardiaque du bouquetin ralentir, reprenant son calme habituel. Quand il fût sur que l’animal se tenait tranquille, il retira sa main et coupa délicatement les liens qui retenaient les pattes de l’animal avec son coutelas. Eldor recula doucement, toujours à genoux, pour le laisser se lever sans contraintes. Le bouc ne fit pas prier et se redressa de toute sa hauteur avant de disparaitre dans les plus proches buissons. Le bruit de ses sabots s’éloignant de plus en plus.

Eldor soupira une nouvelle fois, tout c’était bien passé, pour cette fois tout du moins. Il se redressa puis alla s’assoir au pied d’un arbre, laissant ses propres émotions redescendre doucement. Il n’avait écouté que d’une oreille les questions de Ribur pendant qu’il relâchait le bouc géant. Il essaya tout de même de répondre à toutes les interrogations du seigneur de guerre nain :

« Je suis désolé, je n’ai pas fait attention au chemin que nous avons suivi. Je pense cependant pouvoir retourner au village sans trop de problèmes. Je suis d’accord pour une petite pause, ce bouc nous en aura fait voir de toutes les couleurs, surtout pour vous. »

Un petit sourire fit son apparition sur le visage d’Eldor au souvenir récent de Ribur étant balloté par le bouquetin comme un étendard au grès du vent.

« Non, je n’ai jamais fumé la pipe, mais il faut bien un début à tout, n’est-ce-pas ? Je vous remercie de votre inquiétude à mon sujet mais je vais bien. Je me posais des questions sur l’agressivité de cet animal. Nous a-t-il attaqué en connaissance de cause ou étions nous sur son chemin par pur hasard ? Je suis juste heureux d’avoir pu le libérer sans le blesser. Je ne souhaitais pas le tuer. Je suis aussi content que vous alliez bien seigneur Ribur, même si votre barbe aurait bien besoin d’un coup de peigne. »